La construction européenne a fait taire les armes, elle a ouvert les yeux de peuples qui se croyaient trop différents pour vivre ensemble, elle a prouvé à l’histoire que rien n’était impossible et que l’on pouvait reconstruire, même après l’indicible. Les jeunes Israéliens et Palestiniens n’ont pas cette chance, ou pas encore : ils n’ont pas eu leur déclaration Schuman, la haine et la méfiance réciproque a été leur seule monnaie commune.
L’Union européenne (UE) doit s’engager dans ce conflit pour deux raisons fondamentales. D’abord, elle doit son existence et sa raison d’être à un profond désir de paix, qu’elle doit promouvoir en toute terre, notamment en terre promise. Ensuite, la paix au Proche Orient ouvrirait mille et une portes aux deux rives. Les relations euroméditerrannéennes seraient décrispées, les perspectives de développement économiques seraient considérables, et la portée du symbole serait inestimable au regard des tensions internationales actuelles – car il faut penser aux tensions entre Occidentaux et Orientaux, mais aussi au prix du pétrole ou au terrorisme.
Aujourd’hui, et compte tenu du manque chronique d’information sur les actions européennes, on est amené à se demander si l’UE se mobilise pour ce conflit. La réponse est qu’aucun autre État ni aucune autre organisation internationale ne s’y engage davantage, et financièrement et diplomatiquement.
Les Européens s’engagent fortement au Proche Orient
Loin de ce que l’on pourrait croire, l’ensemble des États membres partagent une position commune sur le conflit depuis 1980 et celle-ci s‘est précisée au fil de nombreuses déclarations. L’Europe soutien le droit des Israéliens et des Palestiniens à deux États indépendants et stables, délimités par les frontières antérieures à l’occupation israélienne des territoires palestiniens de la Guerre de 1967.
Elle condamne fermement et régulièrement les violations de l’armée israélienne du droit international, notamment ses exécutions extrajudiciaires, de même qu’elle condamne aussi lourdement tout attentat terroriste palestinien contre des Israéliens. Elle demande l’arrêt total des constructions de colonies israéliennes en territoires palestiniens et le retrait des 187 000 colons de Cisjordanie. Aussi, elle soutien un règlement durable et accepté par tous pour la ville sainte [1], il en va de même pour la question épineuse du droit au retour des réfugiés Palestiniens [2].
Une diplomatie européenne affirmée : l’Union n’est plus un acteur secondaire
Représentés dans la région par l’inlassable Javier Solana, Haut Représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune de l’Union, et Benita Ferrero-Waldner, Commissaire en charge des relations extérieures, la vision européenne a été reprise dans la “feuille de route” du Quartet réunissant l’ONU, l’UE, les États Unis et la Russie. La force diplomatique européenne est là : les Américains manquent cruellement de crédibilité aux yeux des Arabes, tandis que les Européens sont plus mesurés.
C’est l’UE qui permit et coordonna le seul point de passage entre la bande de Gaza et l’Egypte entre 2005 et 2007 [3], comme l’émissaire de l’Union Miguel Ángel Moratinos fut le seul et unique moyen de contact direct entre Yasser Arafat et Ariel Sharon durant le siège de Ramallah en 2002. Enfin, rappelons que le Processus de Barcelone s’efforça d’intégrer autant les Palestiniens que les Israéliens qui ont tout deux ratifié un accord d’association avec l’UE. C’est notamment cela, l’Europe unie.
1,5 milliard de dollars d’aide aux palestiniens en 2007
Les aides européennes dépassent de très loin celles des pays arabes et des États-Unis [4]. Activement soutenue par le Parlement européen auteur de plusieurs déclarations engagées [5], l’aide est autant humanitaire que structurelle, réformant en profondeur la gouvernance des administrations palestiniennes.
L’agence des Nations Unies en charge d’éduquer et de former des centaines de milliers de palestiniens (l’UNRWA), le Programme Alimentaire Mondial (PAM), ou encore le personnel des huit hôpitaux de Gaza sont tous financés majoritairement par l’Union européenne. Des ambulances de Gaza aux écoles et aux bibliothèques de Jérusalem Est, en passant par les camps de réfugiés, les routes, le traitement des déchets, la modernisation des fermes et la formation des officiers, l’Europe tente de stabiliser les territoires palestiniens malgré tout.
La politique de communication de l’Europe mérite 5/20
L’autre vaste chantier de l’Europe, c’est de dire à ses propres citoyens ce qu’elle fait. Un exemple suffira. Suite à l’élection du Hamas en janvier 2006 la quasi-totalité des journalistes, des politiques et même des analystes ont cru que l’Europe avait arrêté son aide aux Palestiniens. Or bien au contraire celle-ci l’a augmenté de 27% passant à 750 millions d’euros en 2006, uniquement l’aide directe au nouveau gouvernement fut arrêtée. L’UE a aidé plus d’un million de Palestiniens à ne pas sombrer dans une misère dévastatrice [6]
Encore et toujours, la Commission européenne communique mal et trop peu. Dommage pour l’Europe. Mais le vieux continent connaît d’autres limites plus grandes encore. L’unanimité requise pour sa politique étrangère ainsi que l’absence d’une défense européenne sont des handicaps évidents.
Enfin, les efforts de toute puissance étrangère ne peuvent être que déterminants et non décisifs, à un conflit dont la résolution appartient d’abord – on s’en doute- aux jeunes Israéliens et Palestiniens, lointains cousins…
Les Jeunes Européens Sciences Po ont organisé une conférence à ce sujet le 29 janvier 2008 à Sciences Po Paris devant un public nombreux, dont des journalistes de radios et de télévision. Leurs invités comprenaient David Chemla, Président du mouvement israélien « La Paix Maintenant » en France, Bernard Ravenel, Président de l’association France-Palestine Solidarité, Gilles-William Goldnadel, Président de l’association France-Israël, ainsi que Philippe Moreau-Defarges, chercheur à l’IFRI.Président des Jeunes Européens Sciences Po Paris, Schams El-Ghoneimi a pu faire un stage à la Commission européenne au Proche Orient, en délégation.